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Interdire les relations entre les médecins et leurs patients, c’est le but d’une nouvelle opération médiatique

Le médecin Dominique Dupagne est le créateur du site internet Atoute.org et de son forum “Relation entre soignants et soignés”. Des femmes ayant eu des relations sexuelles avec leur médecin se sont manifestées sur ce forum, elles veulent « balancer du porc ». Elles veulent aussi faire interdire aux médecins d’avoir des relations sexuelles avec leurs patients dans le code de déontologie médicale.

Ainsi quelqu’un se disant victime d’un médecin n’aurait plus à prouver d’éventuels abus sexuels, le médecin serait automatiquement considéré comme coupable devant la justice, à moins qu’il n’arrive à fournir des preuves matérielles lui permettant de s’innocenter. La notion d’adultes consentants disparaitrait complétement et une justice moyenâgeuse serait appliquée. Accusé, donc coupable, forcément coupable… Un porc, quoi…

Comme avec l’opération médiatique « balance ton porc », la parole va se libérer et n’importe qui pourra accuser son médecin sans problème. Si quelqu’un est mécontent d’une ancienne relation avec un médecin et éprouve des regrets, il suffira de le dénoncer et le tour est joué.

“L’Obs” a rencontré le généraliste qui pilote l’opération. Extrait de cette interview.

Vous demandez que le code de déontologie médicale comporte un nouvel article : “Le médecin doit s’interdire toute relation sexuelle avec les patients dont il a la charge.” Qu’est-ce que cela changerait ?

La charge de la preuve sera inversée : il ne reviendra plus aux victimes de prouver qu’elles le sont, mais aux médecins de prouver qu’ils n’ont pas abusé de la faiblesse d’un patient.
Les cas de viol ou de violences sexuelles, sans relation construite, sont relativement déjà bien gérés. Je pense par exemple au médecin qui demande systématiquement à ses patientes de se déshabiller pour leur diagnostiquer une angine. Les plaintes sont généralement nombreuses et pointent le même médecin, qui est souvent condamné assez rapidement.
Mais dans ces cas d’abus perpétrés dans le cadre d’une relation émotionnelle, les médecins sont souvent ceux qui s’en sortent le mieux. Ils vont même jusqu’à se positionner en victime d’une patiente “érotomane” à qui ils ont eu “peur de dire non” de peur qu’elle “fasse une bêtise”. Ces médecins sont souvent des notables appréciés, ils sont prêts à tout pour garder leur réputation. Quoi de plus facile pour eux que de diagnostiquer une érotomanie ou une folie chez une patiente qui commence à révéler des choses gênantes.
Je repense par exemple à ce psychiatre qui avait d’abord affirmé que sa patiente, qui avait porté plainte contre lui pour viol, était mythomane. Avant de se raviser quand celle-ci avait apporté, grâce à un enregistrement audio, la preuve de leurs ébats sexuels. Contraint, il avait alors avoué avoir eu des rapports, mais s’en était justifié en expliquant qu’il avait eu recours à des actes sexuels simulés pour “débloquer sa patiente”. En l’espèce, le médecin avait été condamné à un an d’interdiction. Mais il arrive que ce genre d’explications soient jugées crédibles par les juges ou les conseillers ordinaux !
Avec ce nouvel article, les victimes n’auront plus à vivre l’enfer de ne pas être prises au sérieux. Elles ne seront plus obligées non plus de vivre une médiation, un face-à-face avec leur agresseur afin d’arriver à une “négociation”. Pour finalement voir leur agresseur repartir sans peine, ou avec un simple avertissement délivré par un conseil de l’Ordre régional. Comme l’a vécu Marie, avant qu’elle n’obtienne enfin du Conseil de l’Ordre national une condamnation à six mois d’interdiction d’exercice pour le psychiatre qui l’a abusée.

Certains diront que cet article, s’il est adopté, pourrait contrarier un amour sincère entre un patient et son médecin. Ou encore, empêcher un médecin de soigner sa femme.

Aucun de ces deux arguments n’est satisfaisant.
Pour ce qui est d’une éventuelle histoire d’amour, l’article formulé ainsi : “Le médecin doit s’interdire toute relation sexuelle avec les patients dont il a la charge”, permet une certaine souplesse. Si le médecin veut avoir une relation avec un patient, rien ne l’empêche de le confier à un confrère et de respecter une période de carence entre la fin de leur relation patient-médecin et le début de leur relation sentimentale.
Pour l’argument de la femme du médecin, clairement, ce n’est pas la question.

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