Le livre de Sonia Feertchak paru en 2015 : les femmes s’emmerdent au lit : Le désir à l’épreuve du féminisme et de la pornographie, est une réaction face aux contradictions du néo-puritanisme.
Extraits de critiques parues dans la presse :
- Elle.fr
Voilà quatorze ans maintenant que Sonia Feertchak actualise chaque année son « Encyclo des filles ». Chez ses jeunes lectrices, de plus de vingt ans ses cadettes, elle décèle un dilemme qui ne lui est pas étranger.
« Ces jeunes filles, à l’orée de l’adolescence, sont bercées par des modèles à la fois extrêmement sujets et extrêmement objets. Angelina Jolie, Beyoncé, Miley Cyrus sont dans une double quête : celle d’être hypersexuelles et celle de revendiquer une indépendance guerrière. »
Nous voilà donc face à des fillettes à qui l’on explique qu’il faut être puissantes et égales aux garçons… Dans une société du désir qui leur démontre qu’être jolie suffit. Sonia se souvient qu’enfant elle avait découvert les films de James Bond avec une admiration pour le héros : elle voulait être cet agent secret puissant et bagarreur. Avant d’être obsédée par la James Bond girl, cette poupée passive et insipide… Mais tant désirée. « Quel tiraillement ! Je me demandais comment je pouvais m’identifier à cette tarte, se souvient-elle. Je me disais qu’il se passait quelque chose de grave : j’étais en train de devenir débile, aveuglée par la bimbo. »
La « Féminette », comme la nomme sonia Feertchak, est le fruit de ces tiraillements.
Contraction de « féministe » et « midinette », la féminette est cette femme écartelée entre son héritage féministe, qui lui a appris que le refus de la soumission est la clé de son émancipation, et son envie d’être désirée. La féminette est un dilemme ambulant : elle a l’impression de trahir le féminisme en se comportant en objet sexuel et de trahir son désir en s’interdisant d’en être un.
Leïla, 29 ans, se reconnaît complètement dans ce choix impossible. Du haut de ses talons de dix, cette militante est bien consciente que ses atours féminins ne font pas d’elle une « mauvaise féministe », mais elle ne peut s’empêcher de se sentir schizophrène en jouant les objets sexuels.
« Il m’arrive de me sentir coupable d’aimer séduire. Je sais que, quand elle me voit rouler des fesses, ma mère, militante du MLF de la première heure, pense qu’elle ne s’est pas battue pour ça !, raconte-t-elle. Pourtant, si. Pour que nous puissions, si nous le voulons, être aussi des objets de désir. Ça ne nous rend pas moins puissantes. »
Sous les draps, le dilemme se poursuit. Jouir, c’est accepter de lâcher prise – de perdre un peu le contrôle. Au moment de l’orgasme, chacun est vulnérable, ne serait-ce qu’un instant. « Cette vulnérabilité colle mal avec l’héritage féministe de nombreuses femmes, note Sonia Feertchak. Elle a été connotée si négativement qu’il peut être difficile d’accepter d’y céder, même ponctuellement. »
Si l’on écoute toutes ces sirènes, on ne s’écoute jamais, soi. Sarah, 25 ans, se posait jusqu’à peu une question typique de féminette : « J’étais tiraillée entre mon envie d’être dominée pendant l’amour et mes convictions féministes. »
- huffingtonpost.fr
Quand il s’agit d’éprouver le plaisir, les femmes ne seraient pas si libres. Le sous-titre du livre de Sonia Feertchak indique d’emblée l’axe de sa réflexion: aujourd’hui, le désir féminin est mis à l’épreuve du féminisme et de la pornographie.
Née dans les années 70, Sonia Feertchak se considère comme typique de sa génération. Elle n’a pas tort: sa liberté de ton, sa bonne humeur pour parler des choses du sexe, témoignent en tout cas que la libération sexuelle a au moins libéré la parole.
Sonia Feertchak les repère de loin, les nouveaux couples: ils présentent une image parfaite. De plus près, la jeune femme est condescendante, cassante, exaspérée, ou bien elle fait la mère, auprès du jeune homme anxieux de faire bien comme elle veut. Le problème, c’est qu’elle ne sait pas ce qu’elle veut ! On l’aura compris, “la féminette” et “l’amant courtois” s’emmerdent au lit. Si on leur ouvre l’alcôve, les diktats féministes interdisent le plaisir aussi bien que les anciens jugements moraux.
Alors, “les hommes n’existent plus”? Les féminettes s’en plaignent, mais qu’elles considèrent leur responsabilité: elles ont tant culpabilisé les hommes, qu’ils ont abdiqué leur virilité, leur pulsion prédatrice. Elles-mêmes ne consentent pas (et c’est là l’essentiel) à se faire l’objet du désir masculin. Ni même à faire semblant. Surtout, “ne pas passer pour une salope”! Surtout, ne pas s’identifier à la soumission.
La jouissance est difficilement programmable, et le désir capricieux. Sonia Feerstack soulève un autre problème. Le devoir d’orgasme, cette injonction contemporaine, menace le désir féminin aussi sûrement que les dogmes féministes. Et la pornographie, “en substituant l’excitation au désir”, en contribuant au souci de performances, ravale la sexualité à une technique des pratiques.
Elle n’hésite pas à s’attaquer à l’image idéale des femmes d’aujourd’hui, elle incarne dans des mots de chair sa liberté de pensée. En réponse à la menace d’un néo-puritanisme, elle lance un “cri du corps”. Et voilà, écrit par une jeune femme éminemment sympathique, un manifeste à contre-courant, plein de bonne santé, et joyeux.