Témoignage d’une victime du terrorisme islamique parmi tant d’autres :
Avec les deux pieds cassés et s’aidant de béquilles, Oliver D. est comme un lion en cage dans son appartement niçois situé à l’étage… sans ascenseur. Cet ingénieur de 34 ans, qui fait de la compétition en tant que gymnaste, sait qu’il ne va pas de sitôt regagner les tapis. Sa vie sportive est interrompue mais sa vie professionnelle aussi. «Je suis en arrêt maladie et je suis remplacé dans mon entreprise. C’est dur», dit-il.
Ces deux vilaines fractures sont liées à une chute de quatre mètres qu’il a faite le soir de l’attentat à Nice en sautant d’une fenêtre. Olivier était, cette nuit-là, dans un restaurant situé aux abords de la promenade des Anglais et, dit-il, «à 500 mètres du lieu d’arrêt du camion» que conduisait le terroriste, Mohamed Lahouaiej Bouhlel.
C’est alors que, dans la rue où il se trouvait, une nuée de personnes affolées a brusquement surgi en courant. «Une femme s’est précipitée dans le restaurant où je me trouvais. Elle a hurlé: ‘‘Fuyez, les terroristes arrivent. Ils nous tirent dessus”», raconte-t-il. Beaucoup ont cru en effet que des complices venaient poursuivre le carnage du tueur. En réalité, il s’agissait des tirs de policiers qui abattaient le meurtrier.
Mais ce décryptage, Olivier D. ne l’a pas. Il s’attend à une rafale de kalachnikov balayant la salle où il se trouve. Il se voit mort. «Bêtement, on était tous entassés au fond de l’établissement. Si un tueur arrivait, il nous exécutait d’un coup». C’est alors qu’il voit une fenêtre. L’instinct de survie prend le dessus. Il court et saute. Soit une chute de quatre mètres, une mauvaise réception et une fracture à chaque pied . «Avec la peur, la douleur était anesthésiée mais j’étais cloué au sol. Les gens affolés qui passaient à côté de moi ne m’ont pas aidé et j’ai été obligé de me traîner sur les fesses». À cet instant encore, Olivier D. est toujours persuadé que «les terroristes, sortis du tramway, décimaient la ville». Alors que tous les commerçants font tomber les rideaux, il parvient à se glisser chez l’un d’eux où il appelle les pompiers. On lui répond qu’il y a des morts et qu’on ne peut rien faire pour lui.
Peu avant minuit, des amis viennent le chercher. «Mais il fallait qu’ils soient épaulés pour me porter. Dans la rue où les gens étaient hagards, j’ai demandé de l’aide et je me suis bêtement entendu le faire en anglais. J’ai crié help», dit-il. En vain…
Finalement opéré dans la nuit, le jeune homme a ensuite regagné son appartement où il a souffert le martyre. À cela se sont ajoutées les contrariétés. Il est envoyé dans un centre médico-psychologique où, dit-il, une psychologue lui tient un discours dont il ne se remet pas. «Elle me dit que cela avait été mon choix de sauter par la fenêtre. Puis, elle m’a invité à changer de discours si je voulais cesser de me prendre pour une victime. Pour finir, elle m’a demandé pourquoi je voulais de l’argent». Le sportif en ressort médusé. «Si je ne suis pas une victime, je suis qui alors? Superman qui voulait prendre son envol de la fenêtre?»
Puis la deuxième claque vient du fonds de garantie qui indemnise les victimes. Celui-ci a indiqué que seules les personnes situées sur la trajectoire du camion du terroriste recevront une somme d’argent. Le jeune Niçois comprend qu’il ne figure par sur les radars de cette structure. Pourtant, il a bien été invité par les services de l’Élysée à rejoindre les autres victimes de l’attentat de Nice pour la cérémonie qui leur est consacrée…